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Coopération Nord-Sud : quel nouveau paradigme pour un dialogue Afrique/Europe ?

Le président du Laboratoire Citoyennetés (LC) a pris part à une conférence en ligne sur le thème : « La coopération Nord-Sud : quel nouveau paradigme pour un dialogue Afrique/Europe ». Cette conférence, qui a eu lieu le 3 juin 2022, a été organisée par le « Studio Rizoma », « European Commission » et « Citta Di Palermo ». Elle a réuni plusieurs personnalités d’Europe et d’Afrique pour discuter de l’avenir des relations entre le Nord et le Sud. Le Président du Laboratoire Citoyennetés a donné une communication sur la situation de cette coopération.

Raogo Antoine SAWADOGO a axé son intervention sur les obstacles à la coopération et au développement et les chances de renouveler les rapports de coopération entre le Nord et le Sud.

Le « dialogue de sourds et les quiproquos »
Il explique que ce dialogue de sourds entre les Etats du Sud et ceux du Nord s’appuie d’abord sur les Etats bénéficiaires que sont les Etats très pauvres et très endettés qui ne parlent pas le même langage entre eux d’abord, à plus forte raison quand ils s’adressent à chaque pays européen en particulier. De l’autre côté, les pays développés entre eux également ne parlent pas le même langage et chaque pays occidental intervenant dans plus de 50 Etats ne s’adresse pas à chaque Etat selon une logique et une cohérence précises, si bien que cette aide ne parvient pas à produire des effets leviers durables et systématiques. Il produit des îlots de succès qui restent marginaux face à l’immensité des attentes parfois suscités par cette aide. Au niveau des pays donateurs, on constate une certaine lassitude des contribuables européens qui ne perçoivent pas très bien la finalité de l’aide, parfois perçue comme la solution miracle contre l’émigration.

Raogo Antoine SAWADOGO, Président du Laboratoire Citoyennetés, lors de sa communication.

Cependant, il souligne que la coopération de collectivité à collectivité gagne du terrain, le partenariat de privé à privé fonctionne, la collaboration entre acteurs culturels du Nord et du Sud, ou entre ceux du Sud, marche aussi relativement bien.
En ce qui concerne la coopération entre collectivités territoriales décentralisées du Nord et du Sud, il a pris l’exemple de la coopération entre la coordination des communes pour la paix autour de Turin (une trentaine de communes italiennes) qui se sont coordonnées pour apporter leur appui dans beaucoup de domaines au Nord du Burkina Faso dans 15 communes.
Pour ce qui est de la coopération entre enseignants-chercheurs, entre universités du Nord et du Sud qui fonctionne très bien, il a pris l’exemple du Laboratoire Citoyennetés qui a encadré au moins 7 doctorants italiens. Ceux-ci travaillent maintenant dans le monde entier en tant que professeurs d’université. Le LC a également bénéficié de certains appuis techniques et financiers de certaines universités italiennes.

Les manifestations du déclin de l’aide classique
Raogo Antoine SAWADOGO analyse le déclin de l’aide classique en ces termes : « L’aide classique a été pensée, construite et perçue comme un instrument censé apporter la démocratie, le bien-être, la sécurité aux citoyens du Sud. » Il trouve que, soixante ans après, ce qui a constitué le cœur de cette action présente des signes de faiblesse tels que :
La crise des systèmes démocratiques : les institutions existent et tournent (élections régulières avec parfois des scores fleuves, budgets adoptés et exécutés, vote de Loi, etc.), mais semblent de plus en plus déconnectées de la base. Les institutions sont assez souvent surprises ou même dépassées par les attentes et les aspirations de la base. Elles fonctionnent dans une sorte de collusion (Justice, Parlement, Exécutif, etc.). Il y a également un goût inachevé des réformes de décentralisation et une perte de confiance aux mécanismes formels de régulation des conflits (internes à chaque pays et centrifuges au plan communautaire).
La crise sécuritaire : cette crise sécuritaire est d’abord perçue par nombre d’Africains comme la crise d’un modèle de développement mal assumé et peu approprié. La désarticulation entre modèle de développement et système politique a conduit à une fragilisation des États. Ces États, y compris à leurs frontières, sont devenus comme des passoires où groupes radicaux se côtoient et rivalisent dans l’horreur. De là découlent une perte de confiance entre les communautés et l’Etat, une crise de confiance entre les communautés entre elles.

Face au péril sécuritaire, il y a un détournement des citoyens vers des forces alternatives de sécurisation comme le koglwéogo, le dagamba, le dozo, etc.

Créer un nouveau paradigme : la coopération par le bas
Raogo Antoine SAWADOGO donne quelques solutions pour pallier les différents échecs de la coopération Nord-Sud. Pour lui, la perte de légitimité de l’aide va de pair avec la perte de crédibilité des États du Nord vis-à-vis des citoyens du Sud. Elle est aussi accentuée par certaines postures paradoxales de puissances occidentales. Par exemple, entre le cas malien et le cas tchadien on observe, d’une part, la Loi du Talion, et de l’autre la Loi du silence. Face à de telles situations, de plus en plus de voix dénoncent l’hégémonie occidentale en Afrique : monnaie qualifiée de “coloniale”, les multinationales accusées à tort ou à raison de jouer des rôles obscurs, etc. A défaut de s’en passer, refonder l’aide au développement dans ses choix, ses modalités et ses procédures. Autrement dit il faut changer de paradigme.
En voici quelques pistes :
• Bâtir cette aide à partir des communautés locales en privilégiant la proximité, la souplesse et les appuis sur le long terme. Une approche plus territorialisée du développement doit être envisagée à partir des collectivités locales. Cette approche devra intégrer les dimensions culturelles, jeunesse et genre et sécurité communautaire.
• Soutenir la construction d’opinions publiques locales critiques et crédibles en renforçant l’éducation à la citoyenneté, l’accès aux médias libres, etc.
• Renforcer l’autonomisation des acteurs non étatiques du Sud… en responsabilisant davantage par rapport aux ONG du Nord. Les ONG et associations du Sud sont souvent suspectées par les pouvoirs publics et les citoyens d’être de connivence avec les terroristes.

En conclusion, on retient de la communication de Raogo Antoine SAWADOGO que pendant soixante ans les Etats du Nord ont coopéré avec les Etats du Sud mais autour de coopération d’Etat à Etat, avec un ensemble de quiproquos, de non-dits, de suspicions. Les populations en Europe et celles en Afrique ont perdu confiance dans ce type de coopération Nord-Sud. Par contre, les populations entre elles ont inauguré d’autres méthodes de coopérations qui fonctionnent à leur échelle.

Céline SÉOGO, Observatrice Civitac, Ouagadougou

     

 

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Du 02 au 03 février 2024.

Atelier bilan sur la mise en œuvre de l’axe 1 de DEPAC-3 avec les collectivités territoriales partenaires du programme les plus touchées par la crise sécuritaire

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