Centre-Nord : l’Académie royale keoogo de Boussouma refuse du monde

Ce samedi 28 janvier 2023 a lieu, à Boussouma, le premier keoogo de la cour royale. Cette édition, qui n’est pas la moindre, a eu comme invité le conteur émérite el hadj Rasmané BASSAM. L’éclat de cette soirée a été réhaussé grâce au soutien du Centre d’étude et de coopération internationale (CECI) dans le cadre du projet « Djamtan-Laafi Bala ».

Boussouma, commune rurale de la province du Sanmatenga, région du Centre-Nord, est riche de ses variétés culturelles. Dans le dessein de préserver ces valeurs cardinales, gage d’un monde de paix, le dima et ses notables ont pensé à la renaissance du keoogo. Dans la soirée du 28 janvier 2023, la cour royale de Boussouma a refusé du monde. Elle était pleine d’hommes, de femmes, d’enfants et des notables du royaume, ainsi que des invités des secteurs formel et informel, des responsables d’ONG et associations, tous couverts par le dima Naaba Siguiri, qui a honoré l’évènement par sa présence. L’invité d’honneur de cette soirée a été el hadj Rasmané COMPAORÉ, dit Rasmané BASSAM. L’homme, on le connaît bien par son humour à travers ses contes rocambolesques qui obligent le rire à ses interlocuteurs. Une belle occasion pour les fils et filles du royaume de découvrir l’homme d’une soixantaine d’années mais qui paraît en avoir une vingtaine.

Dès l’entame de la nuit des contes, le dima a lancé un appel à tous à l’union sacrée autour de la paix. « Aujourd’hui, nous assistons à une fragilisation de nos ressorts familiaux, communautaires et sociaux. Les repères traditionnels fondés sur les valeurs de fraternité, de solidarité, de paix et de pardon s’érodent face à la machine de la modernité. Nous avons compris que c’est par manque de pardon que survient le mal », a déploré le porte-parole de Sa Majesté livrant son message avant de préciser que la création de la plateforme keoogo se veut un espace de culture des valeurs de la paix. « Sur cette plateforme, nous appelons les fils et les filles du Riungu et du Burkina Faso à cultiver davantage la fraternité, la solidarité, la paix et le pardon. Nous appelons les hommes et les femmes, les filles et les garçons du Riungu et du Burkina Faso à privilégier la cohabitation pacifique et à l’interdépendance communautaire », a invité Sa Majesté.

Les organisateurs de cette soirée sont le keoog-naaba, Dr Poussi SAWADOGO, et les notables de la cour, avec le soutien du Centre d’étude et de coopération internationale (CECI) dans le cadre du projet Djamtan-Laafi Bala, de Handal et Pinal.

Pour rappel, le keoogo royal a été créé et lancé en 2021 et baptisé sous le nom Académie royale keoogo. D’entrée de soirée, le Keoog-Naaba Koobo a livré le message de bienvenue du dima et remercié les partenaires qui ont travaillé à la réalisation de ce projet. Une mention spéciale a été adressée au CECI avec son projet Djamtan-Laafi Bala, ainsi que les autres partenaires ayant œuvré pour la réussite de cette soirée.

Comme la réussite de chaque événement se prédéfinit par son début, la soirée est débutée par el hadj Rasmané BASSAM avec un conte en langue nationale moore, chose qui a permis aux spectateurs de bien s’installer dans des éclats de rire. L’espace keoogo, qui était bondé de monde, montrait l’importance de l’événement.

Revenant sur la genèse du keoogo royal, son naaba relate les fondements de cet espace. « Le keoogo est un espace holistique qui utilise les contes, les devinettes puisés du terroir pour assurer une éducation des enfants au retour aux valeurs cardinales du vivre-ensemble et de la cohésion sociale », a indiqué le Keoog-Naaba Koobo.

La nuit a été ponctuée de contes à thématiques variées en langue nationale moore avec l’invité Rasmané BASSAM et aussi avec certains conteurs du royaume de Boussouma ayant l’habitude d’animer l’espace keoogo. Au nombre des thèmes contenus dans ces contes on peut citer : la parenté à plaisanterie, la cohésion sociale, l’entraide, la jalousie, le bon voisinage, l’amitié. L’assistance est restée jusqu’au mot final des organisateurs acté par le retrait de Sa Majesté.

Ce qui a le plus attiré l’attention du public, c’est le caractère comique du conteur, qui inspire le rire même rien que par le fait de se présenter. Pour marquer leur reconnaissance au grand homme, les filles et fils de Boussouma ont décerné un tableau en guise de présent à el hadj Rasmané BASSAM. 

Chose qu’il a prise avec satisfaction en s’exprimant en ces termes : « Je me réjouis de l’honneur accordé à ma modeste personne en m’invitant à cette tribune, le keoogo. C’est un plaisir de voir que les gens s’intéressent à nos valeurs culturelles. J’ai été invité pour partager ces contes avec les fils et filles de ce royaume et je suis content. Je tiens à remercier sincèrement le dima et ses notables pour cette initiative. Le retour de la paix passe par ces espaces et je suis convaincu que nous retrouverons la paix bientôt », a-t-il déclaré avant de conclure que chacun doit se démarquer de la jalousie et du gain facile, toujours sur un air comique.

La tenue d’un tel événement dans un tel contexte se justifie par deux choses : premièrement, redonner vie à nos valeurs qui agonisent depuis des lustres ; ce qui justifie l’appellation keoogo, qui est un terme puisé dans le terroir et qui veut tout simplement dire : « espace d’éducation ».

La deuxième raison de sa tenue dans un tel contexte est que le cadre dans lequel il se tient fait preuve de résilience en ce sens que les personnes venues de divers horizons auront à vivre des moments d’allégresse et de refoulement.

Selon les explications de Keoog-Naaba, c’est une volonté manifeste de Sa Majesté au vu de la situation sécuritaire dans la région du Centre-Nord et du Burkina Faso de réunir les fils et filles autour d’un idéal commun, celui de la cohésion sociale.

Bédaré OUÉDRAOGO & Josué SAWADOGO, Observateurs Civitac, Boussouma

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