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Cohésion sociale au Burkina : Ils désamorcent les conflits pour un havre de paix à Dori

Dans les villages, il existe une sorte de conflit héréditaire que les jeunes continuent de le raviver à travers leurs comportements. Ce que bien des acteurs s’appliquent à désamorcer à travers des initiatives endogènes de résolution des conflits.

Dans nos sociétés, les conflits sont permanents. Certains sont patents tandis que d’autres restent latents. Ces mésententes sont souvent utilisées par beaucoup pour diviser certaines franges de la population. Mais à côté, tous ne sont pas observateurs. D’autres essayent de trouver des solutions pour venir à bout de ces discordes existantes il y a bien des années. C’est le cas des associations mais aussi des médias qui usent de tous les canaux pour faire taire ces conflits. Il s’agit des mésententes sur les portions de champ ; les conflits de jalousie entre agriculteurs et éleveurs dus soit à la puissance de l’un par rapport à l’autre ; la capacité de l’autre à draguer les filles et même femmes, etc.

De retour de la Semaine Nationale de la Culture (SNC), tenue du 29 avril au 6 mai 2023 à Bobo-Dioulasso, Moustafa KABORE, président de l’Association ACATRAL (Action pour la Culture, des Arts et le Tourisme dans la région du Sahel) nous montre comment leurs activités contribuent à changer les mentalités. « Les activités que nous menons impactent beaucoup les communautés et j’en ai pour preuve, une fois après un théâtre-forum dans un village de la commune de Bani, nous avons été approchés par les leaders communautaires qui nous ont félicités et reconnaissent que la pièce jouée les interpelle sur leur rôle à jouer ».

Moustafa KABORE, président de l’Association ACATRAL

La pièce de théâtre en question faisait ressortir les conflits qui perdurent de génération en génération. Un père qui offre un champ à une tierce personne pour qu’elle nourrisse sa famille et les enfants qui attendent que le papa décède pour revenir déposséder cette personne ; cela a toujours été ainsi sans que les mentalités ne s’accommodent aux manières modernes de faire. Autre conflit que les villageois ont, c’est la rivalité côté femme qui les pousse à etre intolérants, la jalousie aidant, d’où la naissance des conflits souvent agriculteurs-éleveurs.

Et la pièce jouée par les comédiens d’ACATRAL mettait en exergue toutes ces formes de conflits, en jouant le rôle les protagonistes, de sages du village allant à impliquer même les autorités municipales, toujours dans le jeu théâtral.

Après la présentation de la pièce, les populations ont posé des questions pour comprendre le rôle joué par chaque comédien et saisir le sens de son comportement. De telles activités multipliées dans les villages amènent les habitants à comprendre que certaines pratiques et certains comportements d’antan n’étaient pas forcement des exemples à perpétrer. Si le père donne une portion de champ à une personne, il faut la présence de témoins, qui sont les notables du village. Si la femme d’autrui a été draguée, des sanctions reconnues pour ces actes doivent être divulguées et appliquées pour servir d’exemple pour les éventuels contrevenants.

La magie de la radio Kawral

L’exemple de la radio Kawral de Dori aussi s’aligne dans la même logique de construction du vivre-ensemble. A travers des émissions sur la cohésion sociale mais aussi avec l’organisation des journées de l’auditeur, la radio contribue à sa façon à faire taire des conflits aussi petits qu’ils soient, en témoigne Ismaël KONFE, journaliste dans ce média communautaire. « Nous avons une émission en Fulfuldé ‘’SODI HEDAM’’ qui donne la parole à beaucoup d’auditeurs. Et c’est par ce moyen que des parents qui se sont perdus de vue se sont retrouvés. »

Ismaël KONFE, journaliste à la radio Kawral de Dori

Consciente qu’elle joue un grand rôle, les émissions sur la cohésion sociale sont multipliées. Une autre, ‘’DEEDIRAGU’’, parenté à plaisanterie en français, permet aux auditeurs de passer du temps à se taquiner sur les ondes. Certains villages rivaux entretiennent toujours des conflits liés à la terre qui continuent de les diviser.

« A travers ces émissions, ils se taquinent pour espérer s’adoucir les cœurs. Voilà pourquoi, nous avons initié les journées de l’auditeur, pour leur permettre de se rencontrer et taire leurs divergences souvent léguées », explique Ismaël KONFE. Les activités organisées par la radio en dehors des émissions aussi entrent dans cet élan : « A l’occasion de l’anniversaire de la radio Kawral, le 4 février 2023, nous avons regroupé nos auditeurs au sein de la radio, et cela a été des moments de retrouvailles pour certains et pour d’autres de mise au point. Au cours de la journée, il y a eu un moment d’échanges entre les auditeurs et le personnel de la radio. On s’est rendu compte des problèmes que nos programmes ont résolus. Ils ont compris que la terre est sacrée et il faut un mécanisme pour offrir une portion de terre à une personne. Dès lors, ils se sont pardonnés et sont passés à autre chose ».

La radio a contribué à regrouper des jeunes de différents villages voisins où des conflits héréditaires pendaient comme les legs de terre, d’animaux et même de compagnes. « Dans nos villages, il existe une sorte de conflit héréditaire que les jeunes continuent de raviver à travers leurs comportements dans la violence surtout. Chercher la femme d’un ami, détruire le champ d’une personne parce qu’on a vu notre papa le lui offrir, sont entre autres des conflits qui enflamment les jeunes dans les villages. Initier des émissions radiophoniques qui vont mettre à nu ces comportements et trouver des pistes de solutions sont les objectifs poursuivis par la radio Kawral », indique Ismaël KONFE.

Unis dans leur différence

En temps de crise, des activités sont organisées par des associations pour participer à la cohésion sociale dans un contexte où les personnes déplacées et les autochtones cohabitent. Djénéba DIALLO est responsable de l’association pour la promotion de la femme et de l’enfant du Séno ; une association qui regroupe en majorité des déplacés venus de la commune de Gorgadji. Elle-même déplacée, elle comprend que les autochtones et les déplacés se côtoient et il peut exister des différends entre eux, alors leur trouver des activités à mener pourrait les éloigner bien des vices et des querelles inutiles. Et elle s’explique : « Nous avons organisé des théâtres-fora pour occuper les déplacés mais aussi sensibiliser sur la cohésion sociale ». L’association a même impliqué les leaders religieux dans ses activités au quotidien, en ce sens une journée de prière a été organisée à Gorgadji. Des prêches qui ont permis à des quartiers de se réconcilier au point que des villages environnants en réclament pour taire leurs divergences.

Djénéba DIALLO, responsable de l’association pour la promotion de la femme et de l’enfant du Séno

Les membres de l’association mènent des plaidoyers avec les autorités locales pour renforcer la cohabitation pacifique entre hôtes et déplacés. Un cadre de concertation a été mis en place à cet effet. Le premier plaidoyer mené par l’association, c’est de permettre aux déplacés d’avoir des activités socioprofessionnelles (formation dans des métiers) afin de réduire l’assistance et le chômage, des choses qui sont sources de vulnérabilité. Allant dans le même sens, les responsables de l’associations ont sollicité les autorités de plaider auprès des structures financières d’accepter de financer les projets des personnes déplacées internes autant que les hôtes.

Au Sahel, toutes ces activités concourent à apaiser le climat déjà dégradé. Face à l’adversité, la résilience sonne comme une attitude à avoir. Boris CYRULNIK, médecin, psychanalyste et scientifique français du XXe siècle l’avait si bien dit : « la résilience, c’est l’art de naviguer dans les torrents ».

Cheick Yannick SOME

     

 

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