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Ouagadougou/concassage de granite : les raisons d’un travail de titan

Face aux difficultés qu’elles rencontrent pour assurer leur pitance quotidienne, certains hommes et femmes ont décidé de s’adonner au concassage du granite. Ils occupent principalement le site de granite de Pissy, au secteur 17 de Ouagadougou, situé à la sortie Ouest sur la RN1.

Une vue de la carrière de granite de Pissy.

Jeudi 18 avril 2024, il est 09h05 mn sur le site de gisement de granite situé au quartier Pissy de Ouagadougou. La carrière de granite de Pissy s’étend sur plusieurs centaines de mètres de long et 70 m de large avec une fosse d’environ 60 m de profondeur. La carrière existe depuis la période coloniale. En cette matinée assez calme, l’air surchauffé et chargé de poussière, une femme, assise à même le sol chaud, s’attaque à un tas de granite rassemblé devant elle. Son nom : Thérèse. Elle a le visage couvert de poussière grise où ruissellent de grosses gouttes de sueur, les traits tirés. Une petite barre de fer longue de 30 cm environ à la main droite, elle réduit en morceaux de gros blocs de granites. Elle ne semble pas sentir l’odeur âcre des pneus brûlés presque étouffante qui a envahi l’atmosphère.

Thérèse, concasseuse.

Autour de Thérèse, des centaines d’autres personnes, dont plusieurs femmes, s’adonnent au même exercice. Certains sont installés dans le gisement de granite. Il s’agit d’une fosse d’une vingtaine de mètres de profondeur. C’est une carrière à ciel ouvert. De vieilles nattes, des pagnes usés ou de vieux plastiques soutenus par deux ou trois morceaux de bois plantés dans le sol servent de pare-soleil. Cela fait plus d’une trentaine d’années que les exploitants, dont une majorité de femmes, se sont installés à cet endroit. La pauvreté, le chômage, le manque de soutien expliquent leur présence sur ce site. Une des concasseuses nous confie qu’il s’agit d’un héritage de sa famille, ses parents y ayant travaillé. Chaque jour, ces hommes et ces femmes âgés entre douze et plus de soixante ans y vont pour réduire en morceaux ces gros blocs de granite.

Un groupe de femmes concasseuses.

Thérèse travaille dans cette carrière depuis neuf ans. N’ayant aucune ressource pour s’adonner à des activités rémunératrices, elle a préféré s’installer sur ce site. Les débuts ont été très difficiles. « J’avais de la peine à concasser une cuvette de granite par jour à cause de la pénibilité du travail. Avec l’expérience, j’arrive à remplir sept cuvettes par jours », confie-t-elle, le regard plein de fatigue. « Pour que le concassage rapporte suffisamment, il faut arriver sur le chantier à 8 heures au plus tard pour retourner à la maison au coucher du soleil », ajoute le jeune Ali du hangar d’à côté. Un enfant de douze ans à peine, venu avec sa mère, participe également au concassage. Il aurait été renvoyé de l’école pour non acquittement des frais de scolarité par sa mère, son papa étant décédé. Ils sont un bon nombre à être présents sur le site pour des causes similaires. Comme leurs parents, ils respirent la poussière et supportent la chaleur sous leurs tentes de fortune. Bien que le travail soit harassant, ces personnes gagnent très peu dans le concassage. Trois cuvettes de granites concassés correspondent à une brouettée. Une brouette pleine de granite coûte 1 500 F CFA pour souvent six heures de travail. Bien sûr elles trouvent cela trop bas en rapport avec le travail qu’elles abattent. Mais ce n’est pas elles qui fixent le prix. Quant à ce que deviennent les granites concassés, les réponses restent évasives. « Ce sont des agrégats de construction de logis ou de route. Ils sont parfois utilisés pour des œuvres d’art », précise Souleymane, un camionneur. Toujours est-il que le travail manuel du départ n’est pas rétribué à sa juste valeur.

La situation de ces hommes et femmes a touché la sensibilité de certaines autorités et de certaines ONG, d’où la construction d’une école destinée uniquement aux enfants de tous ceux qui travaillent dans cette carrière et la réalisation de latrines sur le site de concassage. Les travailleurs du lieu ont besoin d’un accompagnement en matériel de protection pour travailler plus facilement et sainement.

Else Marie Béréniice BAZIÉ, Observatrice Civitac, Ouagadougou

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